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Christophe, le dernier des mohicans

 

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Loin, très loin d’Aline et des plages gentillettes sur lesquelles il dessinait son doux visage, Christophe, au fil des décennies, est devenu le chantre délicat et incontournable du romantisme suranné. Entre palais en ruines, vapeurs d’alcôves et belles-de-nuit en ombres effervescentes qui valsent sur les remparts, sa voix brisée d’outre-tombe sirote les ballades et ballade le sirop d’une jeunesse à jamais enfuie, d’un bonheur en sourdine de vivre, qui détale par tous les pores de la peau.

 

Christophe est un grand bonhomme, un immense bonhomme, un de ces derniers auteurs-compositeurs poètes du siècle dernier, que la Grande Faucheuse ne nous a pas encore tout à fait enlevé.

 

Il se fait rare, rare comme tout ce qui est précieux, mais ses opus toujours font mouche et nous mouchent dans notre quotidien enclumé et abscons, nous stigmatisent dans cette errance souvent si dévoyée de ce que devrait être le cœur d’une si éphémère existence et d’un temps qui, pourtant, nous fait défaut et nous fuit comme sable entre les doigts.

 

Christophe, c’est la piqûre de rappel. Après, on se sent moins vulnérable aux cons et moins prêt à le devenir soi-même.

 

Son dernier album « Aimer ce que nous sommes » n’échappe pas à la règle. Pas de tube que vous retrouverez sur Énergie ou Hit-FM, mais une succession de mélodies précieuses, ciselées comme saphir, qui vous fera choir le ballet-brosse des mains (pour ceux qui, comme Pollux, n’ont pas de femme de ménage) ou la calculette (pour ceux qui, comme Pollux, n’ont pas de comptable) et regarder l’hiver par la fenêtre et ses cristaux de givre qui dansent la carmagnole, avec une drôle de barre au bide qui pourrait bien ressembler à de la nostalgie, la nostalgie d’un truc perdu, d’un sentiment sur lequel on ne sait plus mettre un nom, mais qui nous fait tout de même bien des choses dans les entrailles. Le temps qui passe, peut-être, et qui, comme dirait un autre grand bonhomme de la chanson, entraîne loin de nous le rire des enfants ?…

 

Il n’y a pas de posologie particulière en ce qui concerne Christophe. Il convient tout de même de ne guère en abuser, car Christophe est douloureux, comme Brahms ou Baudelaire, et comme tous ceux qui nous font comprendre ce qu’il peut y avoir de différent entre nos vies et ce qu’elles pourraient être si nous sacrifiions moins à la routine quotidienne.

 

Pour conclure, puisqu’il le fera éminemment mieux que moi, j’empreinte ces derniers mots à Christophe :

 

Et si le temps m’offrait

l’aumône de lui-même

Je l’utiliserais

Encore et bien fait

À aimer ce que tu es

À aimer ce que je suis

En somme,

Aimer ce que nous sommes.

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