Grosse fatigue (acte deux) - Lire la suite

J’aime pas novembre en Seine-et-Marne. C’est tristounet. Ca sent la betterave encore glauque. Ni froid ni chaud, le temps, juste un truc inconfortable. Un soleil mou. Une pluie encore tiède. Le choriza n’est pas encore dans les pognes, les mains que l’on serre ne sont ni sèches ni humides, juste un brin douteuses. Les femmes vêtues ne sont ni courtes ni longues, juste un brin douteuses. Fallait être un brin dépressif ou avoir un brin à se faire pardonner pour inventer une saison pareille, à ce point interlope…

 

Pas de vacances à l’horizon. Traversée du désert. Remarque, avec ce que nous ont laissé la taxe d’habitation, le tiers provisionnel, les impôts fonciers, la CARPIMKO, la taxe professionnelle, l’horizon de fin d’année, il est plutôt du genre bouché…

 

Tiens, la taxe professionnelle ? Nicolaï ne devait pas l’enlever ? Non non, pas pour les professions libérales. Il a raison le Nicolaï, nous autres, les libéraux, on n’est que des salauds de profiteurs du système, des chancres mous greffés comme parasites sur les budgets d’Etat.

Heureusement que Van Requiem veille au grain…

 

Vingt-deux ans de carrière. Je me dis que dans le style « bons et loyaux services » c’est bien déjà, non ? Non pas que je réclame ma petite médaille, mais je ferais bien un truc un peu plus fun pour atterrir en douceur vers le repos du guerrier. Genre plombonaute ou chasseur de diplodocus, bref, un truc enfin un peu sérieux…

 

Je marchais sur la plage pellucide, l’esprit en proie aux tourments d’amour, un amour sans visage et sans voix (la beauté est toujours lointaine) mais un amour tout de même. Le sel de Guérande fouettait mes déjà vieilles cicatrices de puceau boutonneux. La vie, devant moi, déroulait son tapis rouge sang et ses désirs carmins. Il me semblait alors que chaque jour était un nouveau jour et que les dés du destin s’en trouveraient infiniment jetés. L’inconnue, et son voile de mystères éthérés, pouvaient surgir de toutes parts. J’avais vingt ans…

 

Puis la vie, nue et sans fard, telle qu’en elle-même, est venue me tapoter amicalement l’épaule : « Vous avez déjà eu, VRAIMENT, un cas comme le mien ? ».

 

J’ai du louper un virage. Faut vraiment que je reprenne la feuille de route…

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